Date de naissance :
29 novembre 1923
Lieu de naissance :
Crusnes (54 ) France
date de décès :
12 juillet 1994
Lieu de décès :
Colombes (92) France
Ralliement :
4 mai 1943 - France combattante - New York ( Etats-Unis d'Amérique )
Engagement dans les FNFL :
8 juillet 1943 - Londres ( Grande-Bretagne )
Matricules :
418T42, 647FN43
Affectations :
Minerve, Doris, Commandant d'Estienne d'Orves , Caserne Surcouf, Caserne Bir-Hakeim, Base Dundee
Grade atteint pendant la guerre :
Quartier-maître de 2ème classe électricien
N° membre AFL :
13.129
Engagement : Marine nationale - Toulon 83 (provisoire pour cinq ans)
Matelot de 2ème classe
Engagement : définitif
Matelot de 2ème classe breveté élémentaire électricien
Ralliement France combattante - New York ( Etats-Unis d'Amérique )
Engagement : FNFL - Londres ( Grande-Bretagne )
Matelot de 1ère classe électricien
Rayé des contrôles de l'activité
Avant son ralliement à la France combattante, Jean Boulanger, engagé volontaire le 26 janvier 1942, était matelot électricien à bord du contre-torpilleur Le Terrible. Après le ralliement des forces armées d'Afrique du Nord et d'AOF aux alliés, consécutif au débarquement anglo-américain en Afrique du Nord (opération Torch, 8 novembre 1942), le bâtiment « giraudiste » fut envoyé aux Etats-Unis pour y être réparé et modernisé. Parti de Dakar le 24 janvier 1943, il arriva à New York le 13 février. Le 20 février, il appareilla pour Boston, où devait avoir lieu la refonte du bâtiment. Il y arriva le lendemain. Le 1er mai, permissionnaire avec autorisation de découcher, Jean Boulanger ne rentra pas à bord le lendemain à 7 heures et fut porté déserteur le 4 mai à minuit.
Il se rendit à New York, où il remit une demande d'engagement dans les FNFL à la délégation de la France combattante. S'adressant au général de Gaulle, il écrivait notamment :
« J'ai déjà essayé de me rallier à vous à Dakar. Je venais de sortir de mon cours et pensais que mon heure était arrivée. Avec un camarade nous sommes partis dans la brousse en direction du Tchad. Nous nous sommes perdus dans la brousse et nous avons été repris une semaine après, morts de faim. J'ai été puni de 60 jours de prison et mon camarade a été débarqué à Casablanca.
Quand nous sommes arrivés à Boston, j'ai de nouveau essayé de rallier, mais à la gare je prenais mon billet quand le commandant en second de mon bateau est tombé sur moi. J'ai été forcé de regagner le bord, où j'ai été de nouveau en prison. Aussitôt, je me suis rallié à vous.
Tous nos officiers sont germanophiles. Ils pensent toujours à la collaboration. Nous sommes ralliés aux Anglais et aux Américains, mais nous devons rester fidèles à Vichy malgré tout.
Je me suis rallié à vous sans pression d'aucune sorte, simplement parce que je suis Français et que je veux être avec de vrais Français. Juste pour le bien de la France, la victoire finale et chasser les Allemands de chez nous. »
Jean Boulanger a alors été pris en charge par une filière de la France combattante, dont la plaque tournante se trouvait à Putnam (Connecticut). Dans cette ville située à une soixantaine de kilomètres au sud-ouest de Boston était installée une Académie catholique (Catholic Academy), dont les soeurs et la Mère supérieure hébergeaient, apparemment sans savoir à qui elles avaient affaire, des marins de la marine giraudiste ralliés à la France combattante et dans l'attente d'un transfert, généralement vers Halifax (Canada), via New York, puis vers la Grande-Bretagne, où ils étaient incorporés [1].
Le lieutenant de vaisseau Simottel, embarqué sur Le Terrible, rapporte dans l'enquête qu'il a menée sur place le 17 mai 1943 le fonctionnement de cette filière :
« Arrivant isolément ou par petits groupes, les marins étaient logés dans une petite maison appartenant au couvent, mais séparée de lui par la route. Ils étaient envoyés par une demoiselle Tissot de la "Legation (sic) de France à New York", ou Sieur Rotival de la "Légation de France à Washington". (Il y a lieu de penser qu'il s'agit des "délégations de la France libre" dans ces deux villes). Ces mêmes personnes opéraient le rappel à N. Y. [New York] (lorsque la Mère supérieure ne le demandait pas elle-même en raison de la mauvaise conduite de ses invités).
La Mère me dit alors avoir reçu 4 ou 5 groupes de marins (5 à 7 hommes chacun) et les avoir hébergés depuis 2 mois. Elle ne peut m'en donner la liste.
Les pensionnaires étaient présentés à la Mère Louise et aux soeurs comme des marins ayant besoin de repos. Si ces apparences paraissent les avoir abusées, il est à noter toutefois que la plupart des marins portaient l'insigne gaulliste.
Durant leur séjour à Putnam, les hôtes de l'Académie catholique recevaient de l'argent de Mme Rotival, qui mettait même de temps à autre une voiture (avec de l'essence) à leur disposition. Certaine de leurs promenade a même fini par un accident. Mr. Rotival, lorsqu'il venait à Putnam, rendait visite à ces marins. Sa femme habite en effet auprès du couvent et semble avoir assuré une liaison personnelle.
Arrivés à des dates différents, les marins étaient rappelés en bloc, sur un télégramme du type général ci-après : Faites redescendre à New York le groupe de X marins hébergés en ce moment à Putnam.
Les signataires du télégramme étaient :
Il est à supposer que ces trois personnes travaillent ensemble et qu'elles sont vraisemblablement chargées de tenir les marins parés à prendre les convois qui les conduisent à l'étranger à la disposition des autorités gaullistes. [2] »
Cette enquête a été déclenchée, selon le rapport du lieutenant de vaisseau Simottel, par « une information donnée par le second maître électricien Monot, qui l'a recueillie lui-même le dimanche 16 mai d'une dame Gagne, coiffeuse à Putnam », signalant la présence dans la ville de trois marins du Terrible : Boulanger (électricien), Hains (armurier) Charlot (matelot sans spécialité).
Le lieutenant de vaisseau du Terrible précise le profil de l'informatrice, qui, après avoir soutenu la France libre, est devenue partisane du général Giraud :
« Madame Gagne est une Française qui a fait précédemment partie de l'organisation Fighting French. Depuis le débarquement américain en Afrique du Nord, elle a quitté ce mouvement et son ralliement complet à la cause défendue par les autorités françaises en Afrique du Nord semble dû principalement à l'influence des gradés français rencontrés à Putnam. Elle paraît intelligente et clairvoyante. »
La coiffeuse apprit à l'officier giraudiste qu'un groupe de sept marins français avait pris le jour même le train rapide de 10 h 30 pour New York. Elle précisa même la tenue des membres du groupe : « un seul marin en tenue complète, cinq sans chemisette, deux en civil, dont le marin de la Marine marchande ». Il s'agissait, outre les marins du Terrible - Jean Boulanger, Jean Hains et Jean Charlot - de Maurice Fénery, Clovis Jousseaume (du pétrolier Nivôse), Jean Viroux (du bananier Guadeloupe) et Jacques Richard (du cuirassé Richelieu) [3]. Simottel demanda alors au lieutenant Crowley, du Security Office, chargé des enquêtes relatives aux marins disparus et qui l'avait conduit à Putnam, « d'alerter sans tarder les services de police et de surveillance en gare, afin d'arrêter à leur arrivée à N. Y. [New York] (15 h 19) le groupe de sept marins qu'accompagnent des jeunes filles. » Le lieutenant américain fit immédiatement le nécessaire, mais apparemment sans résultat, puisque tout le groupe de ralliés fut ensuite incorporé dans les forces de la France combattante : six dans les FNFL et Maurice Fénery dans les Forces aériennes française libres (FAFL). Jean Boulanger s'engagea le 8 juillet en Grande -Bretagne et servit successivement sur les sous-marins Minerve et Doris, puis sur la corvette Commandant d'Estienne d'Orves.
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[1] Le 4 mai 1943, indiqué dans l'état signalétique et des services de Jean Boulanger comme date de son affectation à la caserne Surcouf à Londres, a évidemment un caractère purement administratif, comme le montrent les informations ci-dessous sur la suite de son parcours aux Etats-Unis.
[2] Né à Paris en 1892, élève de l'Ecole centrale, Maurice Rotival s'installa aux Etats-Unis au milieu des années 1930, pour y exercer et y enseigner l'urbanisme à l'université de Yale. Il joua un rôle officieux d'agent de liaison à Washington avec les gaullistes de Londres.
Née en 1920, Geneviève Tissot travaillait depuis 1940 pour la Délégation de la France libre à New York.
[3] S'agissant de l'origine de ces marins, l'information donnée par Madame Gagne est floue et en grande partie inexacte : « un marin de commerce, trois marins du Terrible, trois marins du Richelieu (ou peut-être du Montcalm) ».
Sources :
Documents :