Date de naissance :
9 septembre 1921
Lieu de naissance :
Ile-aux-Marins (Saint-Pierre-et-Miquelon) (975 ) France
date de décès :
10 août 1961
Lieu de décès :
Saint-Pierre (Saint-Pierre-et-Miquelon) (975) France
Ralliement :
9 août 1941 - France libre - Saint-Jean 600 ( Canada )
Engagement dans les FNFL :
17 septembre 1941 - 400 ( Grande-Bretagne )
Matricules :
5674FN41, 200B41
Affectations :
Commandant d'Estienne d'Orves, Renoncule
Grade atteint pendant la guerre :
Matelot canonnier
N° membre AFL :
18.669
Ralliement France libre - Saint-Jean 600 ( Canada )
Engagement : FNFL - 400 ( Grande-Bretagne )
Matelot sans spécialité
Matelot breveté élémentaire canonnier
Renvoyé dans ses foyers
Après la signature de l'armistice le 22 juin 1940, Saint-Pierre-et-Miquelon était gouverné par Gilbert de Bournat, représentant du gouvernement de Vichy. Le 20 juillet 1941, Yves Jézéquel et cinq autres jeunes - Maurice Jouquand [1], Eugène Amestoy, Albert Desdouets, Jean-Baptiste Etcheverria et Max Bry - embarquèrent clandestinement sur un doris pour rejoindre Terre-Neuve.
Eddy Florentin a publié dans Les Rebelles de La Combattante (voir les sources au bas de cette page) le témoignage de Max Bry :
« Nous sommes six, tous Saint-Pierrais. Tous venus par des chemins différents pour nous retrouver, en dehors de la ville, au quai du Cap à l'Aigle.
Une embarcation de pêche, venue de l'Ïle aux Marins, île voisine, nous y attend, qui nous transporte sur un autre petit bateau au large, juste abordé au moment où, au loin, s'illuminent les fenêtres de la Gendarmerie. Aurions-nous été dénoncés ?
Par un brouillard épais, une forte pluie, une mer très agitée, le bateau lève l'ancre, cap sur Terre-Neuve. Mais la mer se fait de plus en plus mauvaise. Aussi le patron de l'embarcation décide-t-il de nous déposer, avant la tempête, sur la petite Île Verte.
Là vit un seul gardien avec sa famille. Accueil très chaleureux. Nous y passons le reste de la nuit, à espérer une amélioration du temps. Le gardien, finalement, nous prend, le lendemain, dans son embarcation et nous dépose à la Maline, le point le plus rapproché de Terre-Neuve.
Arrivée très hospitalière. Formalités d'identité. Logement dans une pension. Pour être acheminés, au bout de huit jours, vers Saint-John's. Où une corvette de la France Libre, nommée l'Alysse, vient d'arriver. Je monte à bord pour y signer mon engagement. Mais seuls trois de nos camarades y demeureront. Faute de place, les trois autres, dont moi-même, seront dirigés sur Halifax pour être intégrés, fin août, à un convoi partant pour Liverpool. »
Selon les indications fournies par M. Francis Decker, neveu d'Eugène Amestoy, c'est dans le petit village d'Argentia que les évadés ont débarqué à Terre-Neuve après une traversée de plus de cinq heures.
Yves Jézéquel fit partie des trois marins qui gagnèrent Liverpool dans un convoi parti d'Halifax. Le 23 juillet 1941, il écrivait à ses parents [2] :
« Nous partons pour St-Jean [Saint John's de Terre-Neuve], ensuite pour Halifax. N'importe où j'irai, ne vous faites pas de tracas pour moi ; je vous ai quittés chers parents et aussi mes camarades pour rejoindre ceux qui sauveront la France.
Je vous remercie chers parents de m'avoir laissé partir. »
Le 3 août 1941, il écrivait :
« Je suis à Saint-Jean en très bonne santé, mais j'ai hâte d'aller rejoindre au plus vite les Français Libres. Je pars demain pour une destination inconnue.
Votre fils qui vous embrasse et qui, sa tâche accomplie, espère revenir parmi vous. »
Selon sa demande d'admission dans l'Association des Français libres après la guerre, Yves Jézéquel était peut-être encore à Saint-Jean le 9 août, puisqu'il s'y serait engagé dans les FNFL à cette date. Cette date est sans doute plutôt celle de son ralliement. Selon son état signalétique et des services, c'est le 17 septembre 1941, en Grande-Bretagne, qu'il a signé son acte d'engagement pour la durée de la guerre.
Le 19 septembre il embarqua sur l'Arras, bâtiment base des FNFL, avant d'être détaché à HMS Royal Arthur à la fin du mois d'octobre. Cette base britannique à terre, à Skegness, donnait une formation militaire et abritait aussi une école de timonerie. Le 30 décembre 1941, Yves Jézéquel écrivait à ses parents :
« Je vais commencer un cours de timonier. Mon commandant prétend que je le réussirai. J'apprends beaucoup de choses intéressantes et surtout la langue anglaise : deux heures par jour. Nous avons fait un tir ces jours-ci, et sur une cinquantaine de ma classe j'étais le quatrième. Comme vous le voyez, ce ne sera pas long à tirer sur les Boches. »
Trois mois plus tard, dans sa lettre du 30 mars 1942, il leur annonçait qu'il allait changer de spécialité :
« J'ai quitté le premier cours [de timonerie] ; je pars dans 8 jours pour les cours de canonnier. Je laisserai des choses intéressantes, mais l'essentiel c'est de combattre. Le commandant de mon détachement m'a félicité de ma conduite et de ma tenue. Il m'a dit : "J'espère bien que vous continuerez à suivre la ligne que vous avez suivie depuis cinq mois et demi que vous êtes ici."
Je suis très heureux d'apprendre que papa s'est engagé et qu'il est quartier-maître chef. Je n'ai pas été surpris, car je pensais bien que comme ancien combattant il s'engagerait, dès que j'appris que St-Pierre était rallié à la France Libre. »
Le 5 mai 1942, il confirmait son changement de spécialité dans une lettre à son frère :
« Tu as sûrement appris par les lettres que j'ai écrites chez nous que j'avais changé de spécialité, et que maintenant j'étudie pour être canonnier. Je vais finir le cours à la fin du mois, ensuite j'embarquerai pour faire l'Atlantique ce qui me donnera l'occasion d'aller vous voir. »
Après avoir obtenu son brevet élémentaire de canonnier, Yves Jézéquel embarqua le 1er juin 1942 sur le Commandant d'Estienne d'Orves. Contrairement à ce qu'il espérait, cette affectation ne lui donna pas l'occasion de revoir sa famille à Saint-Pierre-et-Miquelon. Armée par les FNFL à partir du 23 mai 1942, cette nouvelle corvette resta d'abord en Ecosse pour effectuer des exercices à Tobermory, puis à Greenock. Il en dèbarqua le 9 juillet, quelques jours avant le départ du navire, qui allait renforcer les corvettes Commandant Détroyat et Commandant Drogou à Freetown (Sierra Leone).
Affecté à la base de la Clyde à Greenock jusqu'à la fin du mois d'août, il écrivit à son frère le 22 juillet 1942 :
« Tu sais, la vie par ici n'est pas toujours rose, mais, pour le moment, je suis comme au paradis. Plus je vais, plus je change de caractère ; je n'aurais jamais pensé que je serais devenu aussi bon dans les Forces de la France Combattante. Je vous ai déjà dit sur plusieurs lettres que je n'avais jamais été puni. Depuis mon engagement je n'ai pas encore été consigné ; pourtant presque tous les jours j'en voie qui attrapent de la caisse. Partout où je suis passé, j'ai été estimé de mes chefs et j'ai toujours obtenu ce que je leur ai demandé. Il y a beaucoup plus d'intérêt à bien faire. Sur le bateau où j'étais embarqué, je faisais la chambre du Commandant [3] et celle du Second. Je t'assure que c'étaient deux braves vieux, et que je les ai bien regrettés quand il a fallu que je les quitte. »
Du 25 août au 2 octobre 1942, Yves Jézéquel fut affecté à la corvette Renoncule. Après un séjour à la base de la Clyde à partir du 2 octobre 1942, il embarqua sur la Roselys le 15 novembre, jour de son appareillage de Greenock. Le 16, à partir de Moville, la corvette escorta le convoi ONS 146. Le 29 eut lieu la relève de l'escorte en mer et, en compagnie de la Lobélia, la Roselys fit route sur Saint-Pierre, où les deux bâtiments s'amarrèrent le 1er décembre à 8 h 30.
A partir de cette date, Yves Jézéquel fut affecté à Marine Saint-Pierre, avant d'embarquer à nouveau sur des corvettes : l'Aconit, puis la Roselys.
A partir du 20 mars 1943, il ne navigua plus. Réformé le 12 juin, il fut renvoyé dans ses foyers le 30.
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[1] Contrairement au cinq autres évadés, Maurice Jouquand ne s'est pas engagé dans les FNFL mais dans l'armée de terre de la France libre.
[2] Les extraits de lettres cités dans cette notice proviennent tous de La Liberté de Saint-Pierre-et-Miquelon, mise en ligne par le service des Archives et le Musée de la Collectivité Territoriale de Saint-Pierre et Miquelon. Le numéro 1 parut le 31 janvier 1942, soit un mois après le ralliement de l'archipel à la France libre, suite à l'opération de l'amiral Muselier à Noël 1941. Cet « hebdomadaire indépendant » a publié dans sa rubrique « Nos combattants nous écrivent » des extraits de lettres envoyés par des Français libres à des membres de leur famille. Voir d'autres extraits dans les documents joints.
[3] Le lieutenant de vaisseau Henri Fontagnères a commandé le Commandant d'Estienne d'Orves de février 1942 à mai 1943.
[Dernière mise à jour : 28 septembre 2021]
Sources :
Documents :