Gabriel, Noël   GUÉGUEN

En 1940 Gabriel Guéguen, novice âgé de 16 ans, faisait partie de l'équipage de l'Ar Zénith, courrier de l'Ile de Sein, qui assurait le transport de passagers et le ravitaillement de l'île, à raison de deux liaisons hebdomadaires à partir du port d'Audierne. Le 19 juin, lorsque le bateau accosta en fin de matinée à Audierne, un groupe de jeunes, qui avaient eu connaissance de l'appel lancé la veille par le général de Gaulle et essayaient en vain de trouver un bateau pour gagner l'Angleterre, s'adressèrent au patron, Jean-Marie Menou, qui accepta de les embarquer. Ils étaient 21 jeunes et quelques militaires isolés. Au dernier moment, une section de chasseurs alpins monta aussi à bord. Quelques militaires embarquèrent également lors d'un arrêt à Sein, puis l'Ar Zénith mit le cap sur Ouessant, où le capitaine put trouver suffisamment de carburant pour rallier l'Angleterre. Après une traversée difficile, l'Ar Zénith arrivait à Plymouth le 21 juin à 8 heures du matin.

Dans une lettre du 2 septembre 1998 au président de l'association A.P.P.E.L. [1], Gabriel Guéguen a raconté la suite :

« L'équipage de l'Ar Zénith, à son arrivée à Plymouth, a débarqué les militaires se trouvant à bord et s'est rendu à Salcombe. Là, nous avons été ravitaillés par les Anglais. Nous y sommes restés quelques jours. Mais au matin du 3 juillet 1940, l'opération "Catapult" [2] précédant l'action du soir à Mers el-Kébir, nous contraignit à retourner à Plymouth sur un chalutier britannique. Nous avons été mis dans le camp Raleigh avec de nombreux Français. Nous y sommes restés quelques jours puis les Anglais nous ont ramenés à Salcombe dans un autocar aux environs de la mi-juillet. (Mes souvenirs sont un peu flous). Nous vivions sur l'Ar Zénith. Pour l'anecdote, nous avons fait la moisson dans une ferme des environs. Le 15 août, l'Ar Zénith est réquisitionné par les Anglais et fait route sur Falmouth, où il passe toute la guerre. Quant à nous, nous embarquons sur le Quartzite à Salcombe, bateau français des carrières de l'Ouest, dont le siège est à Saint-Malo. Nous y travaillons jusqu'au mois d'octobre, effectuant divers travaux sous les ordres des Anglais (notamment le renflouement d'un cargo belge, le Louis Sheid. L'équipage d'Ar Zénith est à ce moment toujours en civil.

Au mois d'octobre, le Quartzite retourne à Plymouth en cale sèche. Mon frère Michel et moi-même nous rendons à Londres, où nous signons notre acte d'engagement le 5 novembre 1940.

De là, mon frère se rend sur le Courbet à Portsmouth et ensuite sur le chasseur Boulogne à Cowes, où il passe toute la guerre. Quant à moi, je suis retourné à Plymouth, où j'ai embarqué sur le sous-marin Minerve et ensuite sur le sous-marin Doris, où j'ai terminé la guerre. »

En trichant sur son âge, Gabriel Guéguen a donc pu s'engager dans les FNFL le 5 novembre 1940. Affecté au sous-marin Minerve pour compter de la même date, il n'embarqua vraisemblablement sur le bâtiment que le 28 novembre (voir sa demande d'admission dans l'Association des Français libres après la guerre). Le commandant en second, Jacques Le Gall, le désigna comme membre de l'équipe de débarquement et de prise.

Le 10 octobre 1943, alors que la Minerve naviguait en surface au large de Plymouth, un Liberator néo-zélandais, croyant avoir affaire à un sous-marin allemand, l'attaqua en piqué. La Minerve plongea et regagna Plymouth, avec deux morts et deux blessés graves à bord. On dut renoncer à réparer le navire, qui fut mis en réserve spéciale.

L'équipage et l'état-major de la Minerve armèrent ensuite le sous-marin Doris, ex-Vineyard, construit en 1944 en Grande-Bretagne et prêté à la Marine française. Gabriel Guéguen y fut affecté pour compter du 14 mars 1944, mais n'embarqua sans doute que le 15 avril (voir sa demande d'admission dans l'AFL). Il en débarqua le 1er février 1946 et fut alors affecté au sous-marin Curie jusqu'en juillet 1946.

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[1] A.P.P.E.L. : Association Pour Perpétuer l'Esprit de Liberté, créée en 1996 pour racheter et restaurer l'Ar Zénith.
[2] Opération Catapult : saisie par la Royal Navy des navires de guerre français se trouvant dans des ports britanniques. L'internement de la Flotte X de Vichy à Alexandrie et l'attaque des navires français à Mers el-Kébir s'inscrivent également dans le cadre de cette opération.

Informations complémentaires :

• Sur l'Ar Zénith :
  
  • Pierre Louis AUFFRET et Pascal BRESSON, 19 Juin 1940... Ar Zénith en route vers la liberté !, avec une préface de Jacques LE GALL, Bleu b Editions, 200
  • Brochure : Patrimoine breton et national - Histoire de l'épopée du navire Ar Zénith, s.d.
• Sur la Minerve : Maurice PASQUELOT, Les sous-marins de la France libre, Presses de la Cité, 1981

[Dernière mise à jour : 26 janvier 2022]