Date de naissance :
6 octobre 1924
Lieu de naissance :
Brélès (29 ) France
date de décès :
11 septembre 2012
Lieu de décès :
Bois-Guillaume-Bihorel (Bihorel) (76) France
Engagement dans les FNFL :
15 septembre 1940
Matricules :
314CAS40, 4978FN40
Affectations :
Courbet, Bouclier, Mimosa, Ouragan, Léopard
Grade atteint pendant la guerre :
Matelot mécanicien
N° membre AFL :
5.803
Engagement : FNFL
Muté aux FAFL (Forces aériennes françaises libres
Démobilisé à Rennes Saint-Jacques
Jacques Le Gall a raconté dans un numéro spécial de la Revue de la France libre, n° 310, 4ème trimestre 2000, son évasion vers l'Angleterre en juin 1940, son engagement et son parcours dans les FNFL puis dans les FAFL (Forces aériennes françaises libres).
C'est à l'Arsenal de Brest, où il était entré comme apprenti, qu'il apprit le 17 juin 1940 « la honteuse capitulation du maréchal Pétain ». Quant à l'appel du général de Gaulle, le lendemain, il ne l'entendit pas, car il n'avait « ni électricité ni radio à la maison ». Mais les choses se précipitèrent le 19 juin :
« Ma mère m'envoya, à vélo, chercher du pain à Lampaul-Plouarzel. J'y rencontrai un copain de classe, Joseph Poumelec, qui me dit que toute une équipe de jeunes Brestois et Saint-Renanais attendaient à Porspaul pour aller en Angleterre à bord de l'Yvette, un dundee sablier, patron Michel Kérébel, dit l'amiral [1]. En une minute ma décision de partir avec eux fut prise et je me rendis à la cale de Porspaul. Tous les partants étaient déjà à bord et je m'apprêtais à rejoindre la gabarre à la nage quand un canot s'en détacha à la godille vers la cale. Il en débarqua un jeune homme à l'allure de lycéen qui, je le sus bien plus tard par lui-même, était le futur amiral Giret, et le canot m'amena sur l'Yvette.
En breton, je demandai à l'"amiral", qui connaissait très bien ma famille, de me prendre à son bord. Il accepta en me disant qu'après tout, cela ferait un bel aller et retour sur Falmouth. Peu après, nous fîmes route à la voile et au moteur, un vieux Bolinder, cap au nord vers l'Angleterre. Tous les partants regardaient, le coeur serré, défiler à l'est : la côte sauvage du Léon, et à l'ouest : l'île d'Ouessant. Au large de l'île Vierge, un monomoteur allemand nous croisa sur bâbord, cap vers Ouessant. En mi-après-midi, un thonier sous voile, cap à l'ouest, coupa notre route puis en fin de nuit un torpilleur anglais nous arraisonna et ce fut tout jusqu'à la côte anglaise. Peu avant Falmouth, une batterie de côte nous tira un coup de semonce et la gabarre mit en panne. Une vedette armée nous fit alors sortir du champ de mines de protection du port et nous pilota jusqu'en rade de Falmouth, où mouillaient de nombreux cargos français.
Au cours de l'après-midi, l'Yvette accosta au pier de Falmouth et nous débarquâmes pour être conduits en autobus au Princess Pavillon, un parc de la ville. Nous y apprîmes l'appel du général de Gaulle, mais les Anglais ne firent aucune pression sur nous pour que nous y répondions. Le lendemain, départ en train pour Londres et Anerley School [2], où nous restâmes jusqu'à juin [3], date à laquelle un lieutenant de l'armée de terre vint nous parler de la France libre. Le 2 juillet, départ pour Olympia Hall [4] où le lendemain je signais mon engagement à la France libre.
Le 11 juillet, avec environ 180 jeunes F.F.L. de 16 à 18 ans, sous les ordres du capitaine Lescure et des sergents Le Tac, Kuhner, de Kergolay, Lamodière et Le Guével, je quittais Londres pour Brynbach au pays de Galles [5]. On nous proposa plus tard de suivre les cours d'une Ecole de Cadets de la France libre, vers la mi-septembre, pour devenir officiers ou sous-officiers ; mais, avec beaucoup d'autres jeunes Bretons, je refusai pour m'engager aux F.N.F.L. et prendre de suite part au combat. [...]
J'embarquai à bord du vieux cuirassé Courbet embossé en rade de Portsmouth, à la mi-septembre. On m'affecta au pont comme apprenti timonier, mais je préférais suivre à la machine mon cousin Jacques Rivoallon qui disparut avec le Surcouf [6]. J'y subis les affreux bombardements de Portsmouth au cours desquels le Courbet abattit cinq avions allemands et participa activement au sauvetage de la ville en feu.
Le 22 mars 1941, j'embarquais comme matelot mécanicien à bord du torpilleur Bouclier, à quai à Devonport, mais on renonça à réparer le Bouclier et son équipage fut scindé en deux : une moitié pour armer la corvette Mimosa sous le commandement du capitaine de corvette Birot, l'autre moitié pour armer la corvette Aconit sous le commandement du lieutenant de vaisseau Levasseur.
Je fis plusieurs convois en Atlantique Nord sur la Mimosa, de mai à fin novembre 1941, date à laquelle on me débarqua en Islande pesant 52 kilos pour 1,72 mètre. J'avais alors 17 ans.
Après remise en forme à bord du torpilleur Ouragan en rade de Portsmouth, j'embarquai à Hull le 14 mars 1942 à bord du contre-torpilleur le Léopard commandé par le capitaine de frégate Richard Evenou. A son bord, je vécus la destruction de l'U-136 au large des Canaries [7], l'abordage du sloop Lowestoft [8], la libération de la Réunion [9], un cyclone à l'île Maurice et un autre à Tamatave, et enfin son naufrage sur la côte de Cyrénaïque au cours duquel je fus blessé [10].
Après deux mois de soins à Alexandrie, je rejoignis l'Angleterre, où je quittai les F.N.F.L. le 10 octobre 1943 pour les parachutistes de la France libre.
[...]
Aux paras, je fis mes huit sauts à Ringway, près de Manchester, mais au début 1944, à Cupar en Ecosse, ,je dus quitter le 4e BIA [4ème Bataillon d'infanterie de l'air] pour les F.A.F.L. car ma blessure au pied droit se rouvrait lors de longues marches d'endurance et les paras n'avaient que faire d'un éclopé. Aux FAFL, je débutai mon entraînement d'élève pilote navigateur bombardier à Filey, près de York, mais je dus l'interrompre à cause de ma vue. En compensation, on m'envoya chez les Anglais suivre un stage de contrôleur d'aérodrome, tout d'abord au Groupe lourd d'Halifax à Elvington près de York, puis après la victoire à l'O.T.U. [Operational Training Unit] de chasse à Ouston, près de Newcastle.
Je fus démobilisé fin septembre 1945 à Rennes Saint-Jacques et, après quelques mois en famille, j'entrai en février 1946 comme contrôleur d'aérodrome à l'Aviation civile. J'y restai jusqu'en octobre 1989, date à laquelle je pris ma retraite en tant qu'ingénieur principal des Etudes et d'Exploitation de l'Aviation civile. »
__________
[1] L'Yvette quitta Porspaul, petite crique à Lampaul-Plouarzel (Finistère nord), avec, à son bord, 71 passagers, parmi lesquels le personnel du cadre des ingénieurs de la poudrerie du Moulin-Blanc et des jeunes gens de Plouarzel, Saint-Renan et des environs.
[2] Anerley School : collège de sourds-muets transformé en centre de réfugiés.
[3] Jacques Le Gall veut sans doute dire : jusqu'à fin juin.
[4] Olympia Hall : grand hall d'exposition transformé en lieu de regroupement des ralliés à la France libre.
[5] Né en 1924, Jacques Le Gall était trop jeune pour pouvoir s'engager. Il fut donc envoyé à Brynbach (Pays de Galles) dans une sorte de camp scout mis à la disposition de la Légion des jeunes volontaires français nouvellement créée en attendant que les jeunes qu'ils aient aient atteint l'âge requis.
[6] Le croiseur sous-marin Surcouf disparut le 18 février 1942 , coulé lors d'un abordage avec le cargo US Thomson Lykes au nord-est de Colon dans la mer des Caraïbes.
[7] C'est le 11 juillet 1942 que le Léopard, qui faisait partie de l'escorte du convoi OS 33 à destination de Freetown, participa à la destruction du sous-marin allemand U-136.
[8] Le 12 juillet 1942, vers 2 h 00 du matin, le Léopard, qui faisait partie de l'escorte du convoi OS 33 à destination de Freetown, aborda accidentellement le sloop HMS Lowestoft.
[9] Le Léopard fut engagé seul dans l'opération de ralliement de la Réunion aux Forces françaises libres. Le 27 novembre 1942 il débarqua 80 hommes sous les ordres du capitaine de corvette Baraquin. Le 30 novembre la Réunion était officiellement ralliée à la France combattante.
[10] Jacques Le Gall a été blessé au pied droit le 22 juin 1943 à Derna (Libye) après le naufrage du Léopard. Le 24 mai 1943, le contre-torpilleur avait quitté Malte pour participer à l'escorte d'un convoi de deux pétroliers et de deux cargos à destination d'Alexandrie (Egypte). Dans la nuit du 26 au 27 mai, le convoi qui suivait une route parallèle à la côte africaine à 20 milles dans le Nord dut manoeuvrer plusieurs fois au cours de la nuit pour éviter des attaques d'avions et de sous-marins. Il en résulta pour l'ensemble du convoi une forte erreur en latitude, qui eut pour conséquence l'échouage du Léopard, situé le plus au sud du dispositif d'escorte. Le Léopard se trouva ainsi immobilisé en bordure de la lagune de Driana, à une trentaine de milles au Nord-Nord-Est de Benghazi, à une cinquantaine de mètres seulement de la côte.
Une partie de l'équipage fut hébergée à Benghazi, tandis que le reste demeurait à bord avec le commandant Richard pour tenter de renflouer le bâtiment. L'opération eut lieu le 30 mai, à l'aide d'un remorqueur venu de Benghazi. Sans succès. Une nouvelle tentative aurait été possible à partir du 16 juin après colmatage des brèches et asséchement du torpilleur. Elle ne put avoir lieu, faute de remorqueur disponible. Trois jours plus tard, le 19 juin, le bâtiment se brisait en deux sous l'effet de la houle. Le commandant Richard resta à bord avec une cinquantaine d'hommes pour diriger la récupération du matériel susceptible d'être sauvé. Mais comme Benghazi ne pouvait envoyer aucun moyen de levage sur place, on ne put récupérer que le matériel qui pouvait être transbordé à main d'homme.
Le 1er juillet, le personnel qui campait encore sur la plage fut dirigé sur Alexandrie.
[Dernière mise à jour : 14 septembre 2021]
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