Pierre   CORNEN

Date de naissance :

27 septembre 1898

Lieu de naissance :

Ouessant (29 ) France

date de décès :

11 février 1948

Lieu de décès :

Marseille (13) France

Matricules :

Marseille 16684

Affectations :

Châteauroux, Forbin, Saintonge

Grade atteint pendant la guerre :

graisseur marine marchande

31 août 1940

Jean Laborde ( Paquebot )

août 1941 <

Châteauroux

Forbin ( Cargo )

Saintonge ( Pétrolier )

Pierre Cornen était graisseur à bord du Jean Laborde, lorsque, après l'armistice du 22 juin 1940, le paquebot des Messageries maritimes, qui desservait la ligne Chine-Japon, reçut l'ordre de l'amirauté française d'interrompre son voyage vers l'Extrême-Orient. Alors qu'il faisait route de Dakar (Sénégal) à Capetown (Afrique du Sud) le navire rejoignit donc Pointe-Noire (Congo), où il arriva le 26 juin. Le 28 août, le Moyen-Congo ralliait la France libre. Le commandant de la Marine en AEF et le commandant de la défense de Pointe-Noire étaient arrêtés et gardés à vue. Des ordres antérieurs, entretemps annulés, avaient privé le Jean Laborde de pièces essentielles de ses machines déposées à terre. Mais elles lui avaient été rendues à l'insu des autorités locales, ce qui permit au paquebot de quitter Pointe-Noire par surprise dans la nuit du 31 août au 1er septembre. C'est dans ces circonstances, relatées par le commandant du Jean Laborde, qu'une partie de l'équipage abandonna volontairement le bord au moment du départ pour se joindre aux partisans locaux de la France libre :

« Le 1er septembre, vers 1 heure 15, le remontage des pièces étant terminé, je fis appeler l'équipage pour la manoeuvre d'appareillage. A ce moment, une partie de l'équipage, composée en majorité de personnel de la machine, se précipite à la coupée et malgré les observations de Monsieur Gros, Lieutenant, s'enfuit à terre. Plusieurs des fuyards portaient des sacs ou des valises et de la passerelle où je me tenais, j'entendis quelques cris de : "Vive de Gaulle", "Assassins", "On veut nous faire tuer". Dans les conditions où nous nous trouvions, il était indispensable de rester dans le plus grand calme et il ne pouvait être question, le temps étant des plus précieux, de faire des sommations ou d'exhorter ces gens à faire leur devoir. De plus, la présence à bord d'individus qui ne seraient que des éléments troubles ne pouvait être que nuisible à l'exécution de notre projet. Dans la crainte qu'ils n'alertent les gens de terre et pour éviter des incidents qui auraient pu devenir très graves l'appareillage a été poussé encore plus activement que cela n'était prévu. »

Après avoir quitté son bâtiment avec une trentaine d'autres marins, Pierre Cornen rallia la France libre. Il fut affecté au Châteauroux. Le navire était arrivé à Pointe-Noire le 26 juin 1940 et s'y trouvait encore au moment du ralliement du Moyen-Congo à la France libre. Le 6 septembre, il fut saisi par les FNFL. Le commandant, l'état-major et l'équipage choisirent le retour en France. Il furent rapatriés le 9 septembre via Conakry par le Cap Padaran. Le Châteauroux resta en AEF (Afrique-Equatoriale française) jusqu'à la fin du mois de janvier1941. Réarmé par du personnel FNFL venu de Grande-Bretagne, il fut mis en route sur l'Angleterre. De 1941 à 1943, géré par Elder Dempster, il assura de nombreux transports de minerai entre l'Afrique et la Grande-Bretagne.


Le 21 août 1941, le capitaine au long cours Yves Grébert, commandant le cargo Tombouctou, écrivit au directeur de la marine marchande des Forces navales françaises libres à Londres pour lui rendre compte des « agissements très suspects d'un nommé Cornen Pierre, embarqué graisseur sur le ss Châteauroux » :


« 1°- Lorsque je remplissais les fonctions d'officier de liaison de la Marine à Freetown [1], j'avais eu à m'occuper du ss Châteauroux, dont l'équipage avait refusé le départ. Après avoir fait le possible pour donner au navire la maximum d'armement : embarquement de munitions, embarquement d'une mitrailleuse avec munitions, embarquement de vivres et approvisionnements divers, le départ eut lieu.

J'avais dès ce moment remarqué le nommé Cornen, qui se disait être le seul à connaître la machine et les chaudières en particulier et qui par son attitude et ses paroles avait contribué le plus à empêcher le premier départ du navire.

2°- Le mercredi 13 août, j'attendais l'embarcation de la Cie Elder Dempster sur le wharf à Freetown. J'étais avec le chef mécanicien du Tombouctou, lorsque le nommé Cornen est venu me prendre à partie, m'injurier, me reprocher d'avoir voulu les envoyer au cimetière, etc. !!!

Quant au Tombouctou, ajouta-t-il, on verra bien s'il partira.

3°- Le lendemain, une embarcation du ss Châteauroux accostait le Tombouctou, le nommé Cornen est monté à bord, est allé essayer de débaucher successivement les graisseurs et les matelots pour essayer de les faire mettre en grève : le résultat fut piteux car il manqua de passer par-dessus bord.

Je signale cet homme très dangereux quant à sa mentalité, qui dans certaines circonstances pourrait provoquer de graves désordres parmi les équipages des navires marchands des Forces navales françaises libres. »


Toutefois, le 2 septembre 1941, le lieutenant de vaisseau Le Normand, nouvel officier de liaison FNFL à Freetown depuis mai 1941, transmettait au commandant des FNFL à Londres le rapport du commandant Grébert avec un commentaire relativisant la gravité des incidents des 13 et 14 août :


« J'ai fait moi-même une enquête et je suis arrivé à la conclusion que le dénommé Cornen Pierre du Châteauroux, très bon chauffeur par ailleurs, a surtout agi sous l'empire de la boisson car, dans les jours qui ont suivi, le calme le plus complet a régné parmi les équipages des quatre navires de commerce FNFL qui se trouvaient ensemble en rade. »


Ultérieurement, Pierre Cornen fut affecté au cargo Forbin puis au pétrolier Saintonge.

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[1] Après avoir  commandé le Fort Binger de novembre 1940 à février 1941, Yves Grébert avait assuré les fonctions d'officier de liaison des FNFL à Freetown (Sierra Leone) entre février et avril 1941.


Recherches complémentaires :

  • Date des embarquements FNFL.


[Mise à jour : 11 août 2024]

Sources :

  • SHD Vincennes, TTY 811, TTY 836
  • André BOUCHI-LAMONTAGNE, Historique des Forces navales françaises libres, t. 5, Mémorial
  • Site francaislibres.net